I want just pancake (feat Susan)

I want jus t pancake

M

a vie n’était que désastre. La tragédie ne cessait de me coller à la peau. Avant même de naitre, j’étais déjà voué à la sueur, aux larmes, au sang, aux flammes, à la mort… et à la vengeance. J’avais parcouru le monde. J’avais voyagé dans les enfers je ne sais combien de fois… Deux ? Trois ? Plus ? Je ne savais plus. Je ne voulais plus savoir. J’avais vu tellement de crimes, de péchés, de tueurs. Je pouvais toujours entendre, ressentir cette envie de vengeance dans ma tête. Parfois faible, parfois forte, mais toujours là. Vieille amie et ennemie silencieuse.

Ma vie n’avait rien d’une vie. C’était une fuite éperdue, une fuite de ma malédiction, des démons que je tuais, des coupables que je punissais, des innocents que je ne pouvais sauver. Je ne sentais plus le souffre dans mon nez, je ne voyais plus le feu qui rongeait les corps, je devais sourd aux cris de détresse. Si je ne voulais rester sain d’esprit, je devais me battre chaque jour. Le repos n’était jamais là. A la moindre négligence, Zarathos, mon démon, pouvait être relâché. Il avait beau s’être calmé, il en restait dangereux et avide de vengeance et d’âmes.

Dans cette vie de souffrance, je perdais tout. Mes parents biologiques, mes parents d’adoption, Roxanne, Emma, Craig… Même Chloé… Trop de nom, trop de visage, trop d’êtres chers qui m’ont devancé dans la mort. Était-ce ça la vie ? La souffrance ? Non… Ce n’était pas ça la vie.  Je le savais, je le voyais. Je devais espérer, je devais me battre pour ceux qui se sont battu pour moi. Pour tous ses êtres qui voulaient me sauver. Je dois continuer.

Mais, avec cette malédiction, ce fardeau que je devais supporter, je n’avais qu’une envie en cet instant. Je n’avais qu’une envie en voyant le petit matin apparaitre. J’avais envie de m’asseoir, de faire une pause… juste une, souffler, mais surtout… j’avais envie de manger cette putain assiette de pancake. Ouais, ça n’a pas l’air grand-chose. Les pancakes n’avaient pas l’air excellents. J’étais dans un petit restaurant pas terrible, paumé au milieu de nulle part. La tenancière avait surement autant de gras que de MST. Mais là, en cet instant, je voulais juste manger des pancakes recouverts de sirop d’érable.

Je regardais mon assiette de cholestérol et de sucre, accompagnée d’une bonne tasse de café fumante. Alors que je commençais à couper un morceau de pancake, j’entendis la porte s’ouvrir. Par pure réflexe, je levai les yeux et la vit : Susan… Joie ? Un peu… Exaspération ? Un grand oui. Je suspendis mon geste espérant me tromper. Mais bon… Chance de la croiser ici ? Nulle… Chance qu’elle m’invite, moi, l’esprit de la vengeance, à un pique-nique ? Nulle… Je retenais un soupir. Je n’allais pas avoir un break dans ma mission de vengeance. Mais au moins, j’avais des pancakes.

Malgré tout, je ne laissais rien paraitre de ma déception de ne pas avoir un break. Enfin, je veux dire que je ne manifestai pas une tête plus déprimée qu’habituellement. Mettant un morceau dans ma bouche, je l’invitais à venir. Après tout, je pouvais me montrer un minimum poli. Alors qu’elle s’approchait, j’avais le morceau. Dégeu.

« Quoi de neuf ? »

A peine posée, je buvais un coup du mélange noir fumant… Immonde lui aussi… Quelle vie de merde.

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ue, une des mes rares amies, enfin, je le supposais. En fait, je ne souhaitais pas trop avoir d’amis. Chaque fois que je me rapprochais de quelqu’un, il devait se faire embarquer et balayer par ma malédiction. Je souffrais et je faisais souffrir. Ainsi aller ma vie. Cependant, la revoir me rappelait également de bons souvenirs. Une carrière au cinéma, certes courte, mais bien existante, mais la vie m’avait rattrapé comme souvent.

Elle traversait l’enfer d’après ses dires. Je n’en relevais rien. L’enfer, il le vivait depuis 20 ans. L’enfer, il le connaissait depuis 20 ans. L’enfer des espoirs donnés et repris. L’enfer de sentir son âme et son corps brulé. L’enfer qui consume ta famille. L’enfer où l’on te torture jusqu’à la fin. Oui, le vrai Enfer, tout le monde l’avait vécu, mais peu s’en souvenait. Il aurait pu cracher sur cet enfer qu’elle pensait vivre. Mais il n’en fit rien. Chacun avait ses démons.

« Une nourriture décente ? Le pancake a un gout de carton. Le sirop, on dirait la colle et le café… Bordel… On dirait de l’essence. Si tu testes les œufs au bacon, tu auras peut-être droit à un supplément champignon. Mais bon, je mange ce que je peux acheter. »

Associant le geste à la parole, je reprenais un morceau de pancake. Ouais, on ne pouvait s’habituer à ce gout. C’était pratiquement un exploit de rater à ce point des pancakes. Ca méritait presque d’en faire un détour touristique.

« Ce que je fais dans le coin ? Je crois que tu sais déjà ce que je fais et je crois aussi que tu veux pas de détails sur ce que je fais. »

Je tuais des démons ou des hommes. Pas toujours de manière très belle ou très esthétique. La chaire brulée, les âmes détruites, les cadavres que je laissais derrière moi. Oui, elle n’appartenait pas à mon monde. Et c’était mieux ainsi.

« Ouais, le grand retour… Pas beaucoup de souvenir de notre petit bond dans le temps. Mais il parait que ton mari a fait le plus dur du boulot. Tu lui diras bravo de ma part. Bon… »

Je bus une bonne gorgée de café.

« Tournons pas autour du pot. T’es là pour les démons ? »

Le monde était envahi de démons de toutes sortes. Honnêtement, quand on était un Ghost Rider, fallait-il réellement être un génie pour savoir qu’on voulait me parler de ça ?  

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n long soupir fut la première chose qui traversa mes lèvres. Ce n’était pas vraiment de l’exaspération, enfin, pas totalement. En réalité, je n’étais sûr de rien. Des démons, j’en ai tué à la pelle. Mais je n’avais foutrement aucune idée de pourquoi ils étaient là. Mais ce soupire cachait un autre sentiment : de l’inquiétude. Je sentais le péché de Susan. Il me semblait plus fort qu’avant. Était-ce vraiment qu’une impression ? Je ne pouvais le dire. Je ne restais jamais bien longtemps avec quiconque.

« En réalité, il y a pas beaucoup de héros qui viennent me demander un avis. Vous préférez parler à Strange pour ce genre de truc. Et bon, on va dire que je suis pas hyper populaire. »

Ma réputation n’était pas vraiment la meilleure. Honnêtement, je ne leur en voulais pas. Qui auraient confiance en un mec possédé par un démon qui souhaite purifier tout le monde de leurs péchés ? Même moi, je ne me faisais pas totalement confiance.

« Sinon, pour ces démons, je peux pas te dire grand-chose. Ils sont au service d’un seigneur démoniaque, surement Méphistos. La plupart ont même pas les moyens de lutter contre eux. C’est un problème magique. Il faut utiliser de la magie face à eux. Et pour les enlèvements, c’est pas mieux. C’est pas normal. Ils peuvent juste pas se pointer et tuer des gens. Et surtout pas en si grand nombre. Ca ne fait aucun sens. »

Je ne comprenais pas toutes les lois de la magie. J’avais des connaissances de base. Mais j’étais du genre fonceur, pas penseur. Si j’étais un intellectuel, je n’aurais surement pas vendu mon âme. Honnêtement, j’ignorai le comment et le pourquoi. Enfin, ça me faisait bien penser à quelque chose.

« Enfin, j’ai vécu un truc similaire dans le passé. Méphisto m’avait envoyé des démons au cul pour m’amener en enfer. Mais bon, j’avais vendu mon âme. Il réclamait sa part du contrat. Ca m’étonnerait que tu aies autant de gens qui aient vendu leurs âmes aux démons. Je me demande s’ils sont pas attirés par cette aura qui vous entoure. »
 

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[size=13]usan essayait de trouver des pistes dans ce que je disais. Peut-être pourrait-elle trouver une piste là où je n’en avais aucune. Après tout, les intrigues, les réflexions, très peu pour moi. Je préférais des plans simples et rapides. Honnêtement, si elle trouvait quelque chose, ça pourrait être une bonne chose.

Je passais une main dans mes cheveux. Comment lui expliquait cette aura ? C’était une sensation impossible de décrire. C’était comme expliquer l’ouïe à un sourd ou la vue à un aveugle.

« Vous dégagez quelque chose de surnaturel. C’est pas non plus comme si vous étiez magiques. C’est vraiment subtil. Et il y a aussi le péché. J’ai comme l’impression que le péché est plus fort, j’avais l’impression que c’était juste moi. Mais peut-être pas. »

Elle parla aussi d’une marque. Quelle marque ? Je ne cachais pas une seconde mon étonnement. Mon regard se porta alors sur cette marque. Bon, je n’étais pas vraiment un spécialiste en démonologie, mais c’était bien une marque démoniaque. Attrapant son avant-bras, je le regardais de plus près.

« C’est quoi cette merde ? C’est clairement démoniaque… Et tout le monde, là ? Putain de merde. C’est la même marque que j’avais peint pour invoquer Méphisto.  »

Si c’était la même marque, ils n’avaient aucune chance. J’avais pu survivre des mois avant d’être emmené en enfer. Mais j’étais un Ghost Rider. Eux, ils n’avaient aucune arme pour se défendre. Ils allaient juste disparaitre, se faire enlever et mourir. Un regard compatissant pouvait être lu sur mon visage.

« Je… suis désolé. J’espère que je me trompe, mais cette marque vous lie d’une manière ou d’une autre à l’Enfer. Et si vous êtes liés, vos âmes vont devoir y aller un jour ou l’autre. J’ignore comment ou pourquoi. J’ignore même si c’est possible de s’en débarrasser. C’est… Je ne peux rien faire. »

Je soupirai. Il n’y avait rien à faire. Rien que je ne pensais possible. Il faudrait trouver la source du contrat et l’annuler. Mais peine perdue. On parlait de Méphisto. On ne pouvait avoir le diable à son propre jeu. Ce qui m’inquiétait aussi, c’était ce qu’il pouvait faire avec tant de gens marqués. A quel point la marque s’étendait ? Je ne pouvais le dire.

« Je sais pas te dire la nature exacte de ce lien. Mais ça me dit rien de bon. »